Dans notre représentation collective, la maladie d’Alzheimer est toujours associée à la perte de mémoire. D’ailleurs, dans l’esprit des médecins également, puisqu’ils cherchent à diagnostiquer la pathologie chez les personnes âgées souffrant d’amnésie, un trouble qu’ils considèrent comme un signe précoce de la maladie.
Amnésie et Alzheimer ne sont pas très corrélées
Pourtant, une recherche française indique que les troubles de la mémoire sont loin d’être un bon moyen d’identifier la maladie d’Alzheimer. Pour cette étude, les scientifiques ont comparé les examens cognitifs de patients de leur vivant, avec un diagnostic réalisé après la mort, sur dissection du cerveau. Cette comparaison a révélé que le tiers des patients atteints d’Alzheimer n’avait pas de troubles de mémoire au début de leur maladie, tandis que la moitié des patients sans pathologie Alzheimer était amnésiques, atteints par une toute autre maladie neuro-dégénérative.
Repenser le dépistage et la prise en charge
Ces conclusions invitent à repenser les critères de dépistage d’Alzheimer, mais aussi celui des autres pathologies neuro-dégénératives, pour mieux les diagnostiquer. Cette vision erronée d’une association systématique entre amnésie et Alzheimer a aussi un impact négatif sur la prise en charge thérapeutique des patients, car l’évolution des différentes maladies neuro-dégénérative n’est pas la même. Par exemple, s’occuper d’un patient présentant une dégénérescence fronto-temporale, comme s’il s’agissait d’un patient Alzheimer, peut lui être préjudiciable.
Enfin, les conclusions de cette étude ont des conséquences sur la recherche de traitements efficaces contre Alzheimer, puisque les essais cliniques qui les testent se fondent trop souvent sur le seul critère de l’amnésie pour inclure leurs patients, ce qui peut biaiser les essais.
Les études post-mortem permettent des avancées majeures
Ce type d’études post-mortem est très rarement possible en France, car le don d’organe pour la science est bien trop faible. Pourtant, il permet de faire progresser la connaissance des maladies neuro-dégénératives, et de réduire l’errance diagnostique pour les personnes vivantes. Concrètement en France, 225.000 personnes reçoivent chaque année un diagnostic de maladie d’Alzheimer alors qu’un trouble de mémoire ne devrait pas être le seul indice à conduire à une imagerie cérébrale ou à une investigation plus poussée de la cognition.
Arnaud BEAUSSIER |